mardi 29 juin 2010

Des grenouilles au dessus de la tête

Les arbres de la forêt tropicale peuvent dépasser 50 mètres de hauteur ! À l'image d'une maison de plusieurs étages, la forêt s'organise sur plusieurs niveaux. Chaque strate offre des ressources alimentaires et des microhabitats variés. De jour comme de nuit, les espèces se sont donc adaptées à chacune de ces niches écologiques pour se déplacer, se nourrir et se reproduire. Ces multiples spécialisations, spatiales, temporelles, comportementales et alimentaires expliquent en partie la grande diversité animale de ces écosystèmes.


Les grenouilles arboricoles illustrent bien cette stratification verticale de la “jungle”. Certaines espèces de la canopée, pourtant inféodées au milieu aquatique pour se reproduire, se sont complétement déconnectées du sol. Elles trouvent dans les hauteurs des piscines naturelles (cœur d'une broméliacée, cavité d'un tronc...) pour pondre leurs œufs et/ou assurer la survie des têtards.


Pour observer ces amphibiens acrobates, mieux vaut sortir de nuit et balayer avec sa lampe le dessus des feuilles et les branches. Certaines espèces descendent à moins de trois mètres du sol et, avec un peu de chance et de persévérance, se laissent apercevoir : celles des genres Hyla, Agalychnis et Phyllomedusa sont très caractéristiques et les plus photogéniques. L'espèce que nous vous présentons aujourd'hui, repérée vers 23h à la station biologique Jatun Sacha, est une phylloméduse de Vaillant (Phyllomedusa vaillantii).

samedi 19 juin 2010

La mante de la "manta"


Cette nuit là, dans l'espoir d'attirer quelques beaux spécimens de l'entomofaune, nous mettons en place un piège lumineux près de notre cabane, localement appelé “manta”. Le concept est simple : étendre un grand drap blanc entre deux arbres au travers d'un sentier, l'éclairer avec une lampe U.V. et laisser mijoter quelques heures la nuit tombée.
Le résultat n'est pas à la hauteur de nos espérances et bon nombre d'insectes ignorent notre guet-apens. Par ailleurs, notre cabane ne possédant que de simples ouvertures grillagées en guise de fenêtres, des centaines de fourmis ailées envahissent rapidement la chambre et rendent l'expérience infernale.


Toutefois, nous ne terminerons pas la soirée “bredouilles”. Nous capturons dans une boîte en plastique une superbe mante de 15 cm et dès le lendemain, nous nous mettons au travail pour la photographier. De la tête à l'abdomen, la mante est recouverte d'une sorte de bouclier, aux allures de feuille. Cachée sous cette protection cuticulaire se dissimule une arme redoutable : une paire de pattes ravisseuses qui permettent à l'orthoptère d'attraper ses proies, bien souvent d'autres insectes.

Une légende amazonienne raconte que la mante aide à connaître le sexe d'un enfant, en la plaçant près d'une femme enceinte. Si l´insecte ne bouge que les pattes, l'enfant sera une fille; s´il s´échappe, l'enfant sera un garçon!

mercredi 9 juin 2010

Bolitoglossa : un amphibien “reptiloforme”


Jatun Sacha”, en langue locale Kichwa, signifie “la grande forêt”. C'est aussi le nom donné à une ONG équatorienne créée en 1989, impliquée dans des projets de conservation de la biodiversité. L'ONG possède plusieurs stations biologiques dans tout le pays et l'une d'entre elles, située dans une forêt tropicale humide de 2 500 hectares, n'est qu'à 20 km du village de Campo Cocha (voir messages précédents). Ici, les mammifères sont timides mais les petites bêtes abondent, surtout de nuit : criquets-feuille, grenouilles arboricoles, amblypyges, etc.

Le premier soir, à la lumière de nos lampes frontales, nous tombons nez-à-nez avec une drôle de bestiole. Sa forme est celle d'un lézard mais sa peau, visqueuse et sans écailles, est celle d'un amphibien : enfin une salamandre ! (Bolitoglossa equatoriana). Les salamandres amazoniennes appartiennent à la famille des Plethodontidae. Ces amphibiens, contrairement aux anoures (grenouilles, crapauds...), sont dépourvus de poumons et leur respiration est uniquement cutanée : les échanges gazeux se font donc à travers la peau.


Les urodèles restent discrets en forêt tropicale mais cette espèce semble commune aux alentours de la station. En bordure de sentier, nous en décelons une à deux chaque nuit, à hauteur d´homme. Une facilité qui nous étonne encore car après 18 mois passés sous les tropiques, cette salamandre est bien la première que nous photographions !