jeudi 18 février 2010

L'araignée-loup, mère-poule

Sous les tropiques, la nuit tombe vite et tôt. En quelques minutes le noir absolu règne dans la jungle, offrant au naturaliste un nouvel univers de prospection, à la fois inquiétant et passionnant. Le meilleur moyen pour observer la faune nocturne est de se munir d’une lampe frontale ou d’utiliser sa torche à hauteur des yeux. Cette astuce a l’inconvénient d’attirer des paquets de minuscules insectes indésirables sur notre visage (certains finissent au fond de la gorge…) mais elle permet de voir le reflet des yeux des animaux bien dissimulés dans la végétation.Au sol, il est ainsi possible de voir briller des dizaines de points bleus. Ce sont les yeux des araignées-loup, autrement appelées lycoses. Ces arachnides atteignent ici 10 cm mais ne sont pas dangereux. Le soleil couché, les lycoses quittent leur cachette pour une partie de chasse à l’affût, à la recherche de toutes sortes d’invertébrés dont le chemin passerait suffisamment proche de leurs chélicères.

Prendre le temps de regarder ces prédateurs digérer la chair de leur victime est toujours captivant, mais le comportement le plus bluffant que nous ayons observé est celui d’une femelle transportant sa progéniture : des dizaines de juvéniles qui recouvrent son corps sur plusieurs couches, de l’abdomen jusqu’à ses yeux. A la fois mère-porteuse et mère-poule, la femelle veille sur sa portée avec une attention exemplaire. Jean-Henri Fabre, dans ses Souvenirs entomologiques, s’était déjà régalé à décrire cette «draperie animale» avec les lycoses de Narbonne: « Nulle part ne se trouverait spectacle familial plus édifiant que celui de la Lycose vêtue de ses petits. »

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